Abécédaire

 

 
Muraille
 
 


Mathilde Faugère 

02/03/2019

 

 

Une muraille… Tiens…quelle drôle d’idée...

Ça serait un peu comme des murs. Ça diviserait alors. On les ferait en acier, en béton. Cela empêcherait de passer, de regarder de l’autre côté, de voir le soleil. Quelle drôle d’idée vraiment.

Mais, ce pourrait ne pas être complètement comme un mur. Ce serait plutôt déjà toujours obsolète. On en verrait dans les livres pour enfants, pour parler de châteaux forts. On pourrait y mettre des passages dérobés, on pourrait les contourner. On se ferait passe-muraille. Il y aurait même des « muraillettes »… Elles ne nous feraient pas peur.

Mais qu’est-ce qu’on risquerait pourtant en l’acceptant, ce mot et ce qu’il dit… El Paso, Qalqilya…. Elles risqueraient de se multiplier. On risquerait de transformer montagnes et mers pour en faire des murailles. Comme la Méditerranée déjà. Muraille bleue de l’Europe, d’autant plus effrayante qu’elle reste belle. On devrait avoir peur. Ou plutôt être en colère. Refuser le mot même.

Si on les regarde comme métaphore alors, les murailles… Elles seraient ce qui protège l’esprit ou ce qui est un peu trop fragile. On pourrait en parler alors. Ça ressemblerait un peu à ce dont parle Freud, au « pare-excitation » qui protège du trauma. Comme un pare-choc. Elle amortirait un peu ce qui serait trop insupportable. Et on pourrait vivre mille choses grâce à sa présence. On pourrait l’accepter peut-être comme cela, non ?

Cela voudrait juste dire qu’on aurait peur de tout. Tout risquerait d’être trop, la couche ne serait jamais assez épaisse. Et puis une muraille ce n’est pas en caoutchouc, rien n’y est mouvant. On serait enfermés derrière. Bloqués. On ne pourrait plus que regarder, mais à peine. Sur la pointe des pieds. Derrière nos murs peureux. Coincés.