Hélène Merlin-Kajman

02 février 2013

 

Exemption du sens ?

 

Nous nous demandons parfois, à Transitions, si la sociabilité (la civilité) que nous visons ressemble à ce que Barthes a appelé « la parole paisible », quand la communication passe par la déconstruction de la parole magistrale et la défection du sujet. Samuel Estier en déploie aujourd’hui une figure centrale dans l’oeuvre du critique-écrivain si présent sur notre site.

Avec le haïku, montre-t-il, Barthes découvre une forme esthétique et un geste éthique qui garantissent « l’exemption du sens » - et du groupe.

Voilà qui est troublant : notre rubrique « Juste » ne vise-t-elle pas ce quelque chose qui advient, advient juste (témoins, précisément, les haïkus de Max de Carvalho publiés la semaine dernière) ?

Mais... Il y aurait beaucoup de « mais » à objecter. Mais le dialogisme par exemple, mais la contradiction, voire le conflit ; mais la prudence, mais l’impatience. Mais l’hiatus...

Loglady (19 ans) nous remercie de « ce joli questionnaire qui », dit-elle, « m’a fait réfléchir sur ce que je pensais être des évidences ». La phrase fait plaisir. D’autant qu’elle conclut des réponses toutes « jolies » aussi, sur lesquelles je prélève celle-ci, à la question « Parlez-vous de livres avec des amis, des collègues ? » : « On parle des personnages comme si c’étaient d’anciens amis, qu’on critiquerait ou qu’on regretterait. »

La littérature donne-t-elle plus d’âge à qui est si jeune ?

Elle nous amène aux rives des ténèbres tout en nous en protégeant, suggère Marie-Hélène Boblet commentant une phrase de Genet.

L’hiatus est là peut-être : tout n’est pas soluble dans l’exemption du sens quoique rien ne le soit dans l’exigence contraire.